Comment décrire la création d’une œuvre?
J’ai participé au workshop « Reshape », pendant l’été 2011 à Udine. Meeting international d’artistes, invités à travailler pendant une semaine autour du thème “remodeler”. Remodeler quoi? Les projets architecturaux, la création architecturale, la manière de percevoir l’habitat et par conséquence les relations humaines.
L’image qui synthétisait cette pensée existait déjà: une intuition arrivée par hasard. Dans une soirée d’été je rejoignais des amis à un concert sur la plage bondée de Lignano Sabbiadoro.Mon parcours tortueux du parking à travers le réseau géométrique de la ville m’a amené à parcourir une petite rue où mon regard découvrit,non pas un horizon rougi par le couché du soleil mais une grande construction des années’60, la résidence Cristallo: une grande barre, une mosaïque de fenêtres dans le bleu cobalt du soir.
J’ai interprété ce bâtiment comme le symbole d’une conviction conceptuelle, plus ou moins utopique, généralisée dans l’Europe d’après-guerre, pour résoudre le problème démographique de l’époque. Cette vision est à l’origine des banlieues actuelles.
Dans mon tableau « Reshape relationships » j’ai peint ce bâtiment,et dessiné par la couleur bleue cobalt les structures en béton, éclairées par la lumière jaune des fenêtres.
Ces structures représentent l’incommunicabilité d’identités proches mais distinctes. Des espaces minimaux cloisonnent des vies, des parcours quotidiens, isolés et indépendants.Ces infimes séparations suffisent à congeler toutes les relations humaines.
La résidence est comme un tissu, ou les vies des gens sont des fils,qui se croisent mais ne se lient pas, en restant indépendants et réciproquement indifférents.
J’ai compris tout de suite qu’un sujet si riche d’implications philosophiques, techniques et historiques ne serait pas épuisé dans un seul tableau.
À l’aide de la technique de la gravure, j’ai d’abord créé la série “Reshape relationships”, en représentant des villes, des banlieues, des cités. Chacune des variations sur ce thème sont autant de tentative d’obtenir l’image « idéale », la plus représentative de l’atmosphère aliénante et complexe des résidences collectives.Le projet continue.